''Voyage dans le Finistère, ou, état de ce département en 1794 et 1795'' par Jacques Cambry (livre numérique gratuit- google book) Le district de Pont Croix en 1794 Carte réduite des passages de l'Iroise du Four et du Raz pour servir aux vaisseaux du roy. Dressée au Dépost des Cartes Plans et Journaux de la Marine... / Par le S. Bellin 1764 [Gallica BnF] « L'arrondissement de Pont-Croix est terminé au nord par la baie de Douarnenez, par le Bec-du Raz à l'occident. Il s'avance au loin dans la mer. Les côtes, en s'approchant du midi forment la dangereuse baie d'Audierne ; les autres parties du district sont bordées par les terres de Quimper et de Châteaulin. On compte 15 lieues de Plounéis à l'île de Sein, huit de Douarnenez à Pont labbé. Ces distances peuvent donner une idée de la surface du district ; on aura l'attention d'en distraire les deux lieues de mer qui séparent l'ïle de Sein de la pointe de Raz. C'est un pays sage et tranquille. De sages administrateurs y maintinrent la paix, dans le moment où le reste de la France était en proie à tant de fureurs. Les lois furent suivies avec exactitude, mais sans inhumanité. Je n'ai vu d'administration mieux tenue, plus en ordre, plus en règle que celle de Pont-Croix. Les prêtres assermentés ont vécu tranquilles dans le district de Pont-Croix ; aucune insurrection ne s'est manifestée dans son étendue ; la plus grande liberté régnait dans les opinions ; les contributions s'y sont levées avec facilité. Le dixième de la population sert à présent dans les armées.La terre de ce district est forte sur la côte ; on l'engraisse avec du goémon ; on emploie ailleurs du fumier ; les terres y sont plus légères. On sème en novembre, en mars, pour recueillir dans les mois d'août et de septembre. Le froment, l'orge, le seigle, le sarrazin, l'avoine, le méteil, sont les principales productions du pays ; On y recueille aussi des pois, des fèves, des navets, des panais. Les pommes de terre ne se cultivent que depuis un an. Les cidres, les arbres fruitiers, sont rares dans l'arrondissement de Pont Croix. On n'y voit ni forêt, ni bois de haute futaie. A peine deux cent cinquante journaux de taillis sont répandus sur les trente communes de ce district. Les campagnes se chauffent avec des landes et des genêts ; les prairies y sont rares, on n'y trouve pas un étang. La rivière de Pont-Croix est la seule du district ; elle prend sa source à Plounéis, à une lieue et demie de Quimper ; elle a cinq lieu de cours. Des bâtiments de trente à quarante tonneaux remontent jusqu'à Pont- Croix, éloigné d'une lieue de son embouchure. Le pont de cette commune a besoin d'être réparé, ainsi que celui que l'on trouve entre Meilard et Mahalon ; ce dernier est impraticable. Le grand chemin d'Audierne à Douarnenez, et de Douarnenez à Quimper, est en bon état ; les traverses sont détestables. On désire depuis longtemps une route qui communiquerait de Pont-croix à Pont-l-'Abbé ; elle serait peu coûteuse, importante et n'aurait que six lieues de long. Le principal commerce du pays consiste en grains, en lin, en bétail, en moutons excellens : on nourrit sur la côte une grande quantité de ces derniers animaux. Malgré la facilité qu'on aurait d'établir des manufactures dans la maison des Ursulines, à Pt-Croix, par exemple, il n'en existe aucune dans le district ; les laines passent à Carhaix, à Morlaix. Elles se vendent dans le mois de juin. Point de tannerie dans le district, malgré la grande quantité de cuirs verts qu'on y trouve et les moyens d'en établir sans grande dépense. Point de papeteries et beaucoup de chiffons. Toutes les poteries se tirent de Quimper, les ardoise du Port-Launay, de Redon. La côte est bordée de granits ; Les pierres de l'intérieur sont schisteuses, en général. On a fait passer au citoyen Schereber, inspecteur des mines, les montres de charbon de terre trouvées dans la commune de Cléden. Les entrepreneurs de Poullaouen ouvrirent, il y a trente ans, deux puits, une galerie assez profonde ; ils ont abandonné tous travaux gênés par les obstacles que le gouvernement pourrait lever. A Port-ar-Hantic, à une portée de fusil de Pont-Croix on trouve des eaux minérales estimées par la médecine . [sur le Goyen entre Pt Croix et Larrin en Mahalon] « Les terres qui couvrent le Bec-du-Raz sont soigneusement cultivées par les femmes ; elles sont riches en froment. Les maris pêchent et naviguent. On trouve par intervalle dans la paroisse de Cléden, les traces d'un chemin de pierre de taille nommé par les Bretons ''hent-Abès'', il a soixante dix pieds de large ; il se prolonge jusqu'à la baie des Trépassés. On devine que de savans voyageurs en donnent la construction aux Romains, à Jules César, le grand faiseur de toutes les merveilles, de tous les murs, de toutes les ruines de la France et de l'Angleterre. La baie d'Audierne forme un arc dont les extrémités sont la pointe de Penmarc'h et le Bec-du-Raz. Malheur aux navigateurs qu'un vent affale sur ces côtes hérissées de rochers. Sans un miracle, sans une saute de vent très rare, il est impossible de se relever, il faut périr. Le pilote qui de la côte voit les inutiles efforts des matelots, indique avec précision l'heure du naufrage . L'honnête homme palpite à la vue du danger. L'impitoyable habitant de ces rives s'arme de crocs, de cordes, va se cacher dans les rochers pour y saisir ce que la mer transportera sur le rivage. Il attend sa proie, accroupi pour échapper à l'oeil des surveillans. Jadis, il assommait le malheureux qui lui tendait les bras en échappant au courroux des flots ; il l'enterrait et le dépouillait sans pitié ; il est plus humain à présent, il accorde la vie et ne tue que rarement, mais il vole. En vain la force armée tente quelquefois de s'opposer à cet affreux désordre. Il est une digue de cailloux, vis à vis Plovan ; les habitans furieux, unis avec leurs femmes, s'y rassemblent,bravent la mort, attaquent les soldats ; le feu, le sang ne fait qu'augmenter leur audace. Les femmes sont des mégères plus hardies, plus intrépides encore que les hommes. Le comble de l'injustice, de la cruauté, de la tyranie militaire est suivant eux, de leur disputer ce que le ciel leur envoie. Cette année même, au moment d'un naufrage, les habitans de Plozévet et de Plovan, obligèrent la troupe à gagner les casernes ; alors, ivres d'avidité, mus par le démon du pillage, ils se lancèrent sur les débris du bâtiment avec une telle fureur, qu'après s'être gorgés de vins, d'eau de vie, de liqueurs, ils avalèrent une caisse entière de médicamens qui donna la mort aux uns et d'affreuses convulsions aux autres On assure qu'autrefois Plovan était un port ; qu'on a trouvé, dans une prairie présentement éloignée du rivage, des organeaux attachés à de vieux pans de murs. On parle d'un effet très singulier : quand les eaux douces mettent les cailloux en mouvement, ils s'affaissent comme des sables mouvans et pourraient engloutir hommes, chevaux, etc... Le commerce se faisait autrefois plus directement d'Audierne que de Morlaix, en Espagne. La situation y attire de grands poissons, des morue même, qu'on séchait et qu'on envoyait chez l'étranger. Un impôt mal calculé a produit la ruine de cette ville. On a négligé le port qui s'est comblé. Des quais abandonnés se sont naturellement démolis, mais le mal n'est pas sans remède. Outre les poissons, les sardines, les congres secs, on exportait jadis d'Audierne beaucoup de grains : les bâtimens, à leur retour, étaient chargés de vins, de planches et de fer. J'ai vu les côtes d'Audierne, dans un hiver où le rivage était couvert de glaces, bordées d'un cercle d'or qui s'étendait à perte de vue sur la rive. Un vaisseau chargé d'orange s'était brisé sur les rochers ; des milliers de femmes et d'enfans en remplissaient leurs sacs et leurs paniers : tous les chemins couverts de neige et de glace étaient semés de ce beau fruit des pays chauds ; La côte est plate d'Audierne à Penmarc'h ; elle est semée de débris de vaisseaux Les chemins qui mènent à cette côte sont les plus mauvais de Bretagne. J'atteste avoir passé plus de cent mares en m'y rendant, dans lesquelles mon cheval s'est mis quatre fois à la nage, ces routes n'ont pas la largeur nécessaire pour que deux charrettes puissent s'y croiser, et les charrois sont jour et nuit en activité. » « Aucun marché ne s'arrête en Bretagne sans que l'on l'achève au cabaret.. » page 175 Pb de la pêche en baie de Dz