Octobre 1902 à Plozévet... Enquête diocésaine sur l'usage du breton. Retentissements à Plozévet Le 23 septembre 1902, Emile Combes, président du Conseil et ministre de l'Instruction publique, des Beaux-arts et des Cultes , déclarait : « Les prêtres bretons veulent tenir leurs ouailles dans l'ignorance en s'opposant à la diffusion de l'enseignement et en n'utilisant que la langue bretonne dans les instructions religieuses et le catéchisme. Les Bretons ne seront républicains que lorsqu'ils parleront le français. » Quelques semaines plus tard l'évêque, Mgr Dubillard, riposta en sollicitant le clergé de base. Question sur la langue bretonne M onseigneur l’Évêque prie MM. les Curés et Recteurs de bien lui fournir, dans le plus bref délai possible, les renseignements suivants : Quel est le nombre exact des enfants de 9 et 10 ans qui sont appelés, d'après les nouveaux règlements, à suivre dans la paroisse les catéchismes de première communion ? Combien y en a-t-il parmi eux qui soient capables d'entendre facilement et avec fruit le catéchisme français ? Quel est le nombre de ceux qui, connaissant un peu la langue française, ne pourraient abandonner le catéchisme breton, sans sérieux détriment pour leur instruction religieuse. Combien en compte-t-on qui sont absolument incapables d'apprendre un autre catéchisme que le catéchisme breton ? Sans parler des répétitions particulières faites à quelques enfants, y a-t-il dans la paroisse deux catéchismes, l'un donné en breton et l'autre en français ? Quel est le nombre respectif des enfants qui les fréquentent ? Les instructions paroissiales se font-elles en breton ou en français, ou bien encore dans l'une et l'autre de ces langues ?Réponse du recteur de Plozévet : Plozévet le 21 octobre 1902 Monseigneur Je viens vous adresser les réponses au questionnaire que vous nous avez adressé par l'entremise de La Semaine Religieuse. Le nombre exact des enfants de 10 ans appelés à suivre les catéchismes des 1ers communiants est de 92. Parmi eux il n'y a aucun capable de suivre avec fruit le catéchisme français. Il y a aucun garçon qui suit le catéchisme français, quant aux autres, il serait bien inutile de leur demander d'abandonner le catéchisme breton ? Presque tous sont Incapables d'apprendre un autre catéchisme que le catéchisme breton. Les parents ne savent que le catéchisme breton ; Peut être dans quelques années, les filles qui sont à l'école chez les religieuses pourraient arriver à apprendre le catéchisme français. Il n'y a dans la paroisse qu'un seul catéchisme en breton. Le nombre des enfants qui suivent ce catéchisme est entre 250 et 300. Les instructions paroissiales se font en breton et rien qu'en Breton. J'ai l'honneur d'être, Monseigneur, de votre Grandeur, Le très humble et respectueux serviteur. Signé Henry, recteur de PlozévetEn 1902, l'un des vicaires de Plozévet était Guillaume Grall. En 1896, lorsqu'il arriva à Plozévet il avait 24 ans et sortait du séminaire. En décembre 1902, comme plusieurs confrères, il a vu son traitement suspendu en raison d'agissements politiques autour de ce thème. Ses déboires avec le Ministre des Cultes coïncident avec la démission de six conseillers municipaux de Georges Le Bail, en 1902. Les catholiques de la paroisse ouvrirent, avec succès, une souscription pour venir en aide à leur vicaire. La Semaine Religieuse en a fait écho les 14 nov et 5 déc 1902. Extrait de La thèse de Fañch Broudic en accès libre sur internet : « La Lanterne » , journal anticlérical et anti-breton, identifie bien-entendu le breton à une langue de réaction. Souvent la raison s'égare.... : « Les prêches en patois, la langue nationale proscrite et remplacée par un idiome barbare, tels sont les moyens employés jusqu'ici pour entretenir dans les têtes bretonnes la superstition religieuse et en chasser les idées de Liberté[ » . L'utilisation du breton par le clergé a un pouvoir magique : « Ce que les prêtres défendent dans le breton, c'est leur prestige de sorciers, avec les avantages qu'il comporte : respect superstitieux d'une religion grossière, dons en argent et en nature, influence électorale du curé sur ses paroissiens, puissance morale de l'Église et bien-être matériel de ses prêtres. ». En octobre 1902, Frédéric Le Guyader parle du breton d'une manière plus touchante et élogieuse . En voici un extrait emprunté au journal Le Finistère