Les « affaires »
plozévétiennes ...
À Plozévet, en août 1907, le jour de élections cantonales:
L'Affaire Chamaillard.
Henri Ponthier de Chamaillard .
(°23-10-1848 Quimper- ;+ 24-03-1908 Nice)
Pour mieux comprendre ce qui va suivre, voici quelques mots sur M. de
Chamaillard qui s'opposa à Georges Le Bail, lors
d'une « affaire » qui secoua le petit monde plozévétien à l'occasion des
élections au conseil général.
Henri-Pierre Ponthier de Chamaillard fut député monarchiste du Finistère
de 1871 à 1876.
Il fit de solides études de droit à Paris, puis il s'installa à Quimper où
ses plaidoiries furent
remarquées.
Bâtonnier de l'ordre en 1888, il devint maire de Trégunc jusqu'à sa
révocation en 1890, suite à une
manifestation royaliste.
Il fut élu de justesse sénateur conservateur du Finistère en 1897, il
intervint souvent au Sénat
comme orateur de l'opposition de droite.
Voyons d'abord le point de vue du journal « Le Progrès », hostile à
Georges Le Bail :
Au pays de M. Le Bail.
Le guet-apens et les violences de Plozévet.
'' Après les scènes honteuses et inénarrables qui s'étaient déroulées à
Plozévet l'an dernier, au moment des élections législatives,
bagarres sanglantes suscitées au profit du député officiel de la 2ème
circonscription de Quimper et qui ont été flétries, comme il
convenait, par la presse entière et l'opinion publique, il paraissait
impossible que pareils faits puissent jamais se reproduire,
tellement cela dépassait en sauvagerie tout ce qui pouvait se concevoir.
Illusion et aveuglement !
En effet , pour ceux qui connaissaient le député-maire de Plozévet et les
moyens inouïs et ignobles qu'il ne craint pas
laisser mettre au service de ses intérêts et de sa politique, on pouvait
être certain d'une réédition.
Cala n'a pas manqué, dimanche, avec les circonstances aggravantes de
guet-apens et de préméditation.
Qu'on en juge :
M. de Chamaillard, l'honorable sénateur du Finistère, dans le but très
louable de juger de près les actes d' intimidation
et de violences exercées contre les électeurs libéraux de Plozévet, et
dans l'espoir que sa présence et son autorité
tendraient à empêcher le retour de ces faits et à assurer la sincérité du
vote dans la commune, s'y était rendu en voiture,
dans la matinée, accompagné de son fils M. Adrien de Chamaillard, de M.
Grivart de Kerstrat, son gendre, et d'un ami,
M. Gaude.Ils arrivèrent à Plozévet vers 9 h moins le quart et aperçurent
distinctement, à une centaine de mètres, le fils du député
maire qui, après s'être bien rendu compte de leur présence, disparut
aussitôt, évidemment pour donner l'alerte et
prévenir ses troupes.
Ces messieurs descendirent sur la route et arrivèrent, sans être
moindrement inquiétés jusqu'à la cour du lieu de vote.
Dès l'entrée, ils furent interpellés par de grands gamins, des mieux
stylés, qui leur
dirent de ne pas entrer et ramassèrent des pierres sur la route.
M. de Chamaillard et ses amis poursuivirent néanmoins et franchissant
l'entrée, se
trouvèrent en présence de 300 énergumènes (parmi lesquels le fils Le Bail)
des plus
excités, qui , à leur vue, vociférèrent de leur mieux.
La bande d'apaches était composée de cultivateurs et de marins pêcheurs.
Un de ceux-ci tenait ô dérision ! Un drapeau
tricolore, n'ayant pas osé, probablement, arborer
celui couleur du sang, si cher à Le Bail, et qui aurait
été plutôt de circonstance. (on verra plus loin à
quoi il servit.)
Ces fous furieux interpellèrent le sympathique sénateur, l'injurièrent et
le sommèrent de quitter la cour.
A peine M . Chamaillard ouvrait-il la bouche pour déclarer que son
intention n'était pas d'entrer dans la salle de vote,
mais qu'il entendait rester dans la cour, comme c'était son droit
indiscutable, que cette troupe de 300 voyous tomba
lâchement sur ces quatre hommes sans défense, à coups de pierres.
Les assaillis, heureusement étaient bien taillés et des plus résolus, mais
que faire devant le nombre ?
Pas à pas, en reculant et tenant continuellement tête à leurs agresseurs,
ils purent exécuter une retraite de 250 à 300m.
M. Chamaillard, sénateur, fut naturellement le plus visé malgré son âge.
La hampe du drapeau fut cassée sur sa tête et l'on entendit à ce moment le
bruit de deux coups de revolver.
Il fut atteint en outre à la joue, près de la tempe par une énorme pierre,
qui faillit le faire tomber.
On imagine aisément ce qui serait arrivé en cas de chute.
Ses compagnons furent contusionnés à la tête, aux jambes, aux poignets par
des coups dont ils portent encore les
marques irrécusables.
Ils purent néanmoins, en se défendant de leur mieux, atteindre, toujours
en reculant, et en faisant tête à cette meute
écumante, la porte d'une auberge, où nul n'osa entrer, un ordre supérieur
ayant probablement été donné à ce sujet.
Pendant ce temps la voiture de M. Chamaillard était renversée, les rênes
et les chaînettes volées, deux pardessus et les
couvertures de voyage tailladés et hachés en mille morceaux.
Pendant que les victimes de ce lâche guet-apens se concertaient, M. Le
Bail fils, leur envoya dire que s'ils le désiraient,
ils pourraient sortir sous sa protection et qu'il se faisait fort de les
faire reconduire à Quimper en voiture.
Ces messieurs répondirent qu'ils ne voulaient avoir aucun rapport avec M.
Le Bail fils, dont la démarche ne fit que les
confirmer dans l'idée que ces attentats avaient été concertés par lui,
puisqu'il se faisait fort d'y mettre un terme.Et en présence de ces actes
de banditisme, voyant qu'aucune élection n'était possible, ils repartirent
à pied vers
Pouldreuzic, où ils déposèrent une plainte devant les gendarmes, plainte
qui fut renouvelée lundi, entre les mains de M.
le Procureur de la République. »
Septembre 1907 (Le Finistère) :
Plozévet.- Descente de justice.-
Le juge d'instruction de Quimper, accompagné d'un greffier et d'un
interprète, s'est transporté dans le matinée
d'hier, mardi, au bourg de Plozévet, pour continuer son enquête sur les
graves incidents qui se sont produits le
jour des élections cantonales.
Le magistrat s'est rendu à la mairie, où il a entendu de nombreux témoins
de 9h1/2 du matin jusqu'à 5 heures
du soir.
8 décembre 1907
conseil municipal extraordinaire - 9h
1. Affaire Chamaillard.
Une action est intentée contre la commune pour des faits qui se sont
produits au bourg le 28 juillet dernier,
jour de l’élection au Conseil Général.
Avis : Mr Chamaillard lui-même, par ses gestes, paroles et agissements a
été l’instigateur des faits
Le conseil donne mandat au maire pour défendre la commune.
17.05.1908
PV d’installation du conseil municipal
Election d’un maire et de deux adjoints
Conseil municipal :
Kéravec Pierre
Le Guellec Alain
Cabillic Guillaume
CudennecYves
Le Corre Henri
Le goff Henri
Le Bail Georges
Le Floch Pierre
Le Bars Corentin
Le Quéré Jean Mie
Le Gouill Sébastien
Peuziat jean
Nicolas Guillaume
Cabillic Jean
Goyat Pierre
Colin Jean
Le Goff Jules
Le Gouill Yves
Sclaminec Henri
Hélou guillaume
P Kéravec, le plus âgé, prend la présidence. A Le Guellec est secrétaire.
ELECTION DU MAIRE :
1 er tour, 23 bulletins, 23 suffrages exprimés.
Le Bail Georges 22 voix élu.
Kéravec Pierre
1 voix
1 er ADJOINT :
Kéravec Pierre 22 voix élu
Cabillic Jean
1 voix
2 è me ADJOINT :
Cabillic Jean
22 voix élu
Le Guellec Alain
1 voix
ELECTIONS SENATORIALES
1 er tour :
Kéravec Pierre
Cabillic Jean
Peuziat Jean
3.8.1840
24.3.1858
7.1.1864
2èmetour :
Le Quéré Jean Marie
(9 délégués et 2 suppléants)
Le Goff Jules
5.11.1859
Cudennec Michel
5.7.1851
Nicolas Guillaume
24.10.1871
Le Gouill Yves
5.7.1862
Le Berre Yves
12.3.1858
1-06-1872
Suppléants ;
Sclaminec Henri
21.10.1872
et
Goyat Pierre 18.02.1871
Mr Chamaillard décéda en 1908, à 59 ans.
Ses amis imputèrent le décès aux conséquences des violences subies à
Plozévet quelques mois plus tôt.