Entre membres du clergé plozévétien,
ce n'était pas toujours l'entente cordiale...
Le document qui suit s'inspire fortement des études proposées sur le
site ''Plozerche'', rassemblant des
lettres du recteur Mathieu Clévarec qui fut, comme le maire Pierre
Julien, un témoin de la vie de Plozévet
au milieu du 19ème siècle.
Ces écrits sont complétés par deux articles du journal ''L'Union
Monarchique''
Le contexte :
En 1872, Le recteur est Mathieu Clévarec, 58 ans. Le premier vicaire
est Clet Kerloch, 40 ans,
originaire de Plogoff et le second vicaire est Pierre Marrec, 26 ans,
de Plonevez-Lochrist.
Il y a sur Plozévet, une petite communauté de religieuses, toutes
originaires du Morbihan, sous
la direction de la mère Scholastique. Outre la mère supérieure et sa
nièce, il y a 5 institutrices.
La cohabitation entre le ''bon'' recteur et son premier vicaire n'est
pas toujours des plus aisée.
En ce mois de mai 1872 , le recteur s'en plaint au Grand Vicaire.
Le texte encadré est issu de l'excellent site « Plozerche »
Monsieur le Grand Vicaire,
Vingt fois j'ai eu la pensée de vous en écrire relativement à M.
Kerloch, et j'ai été arrêté par cette
considération que jamais encore, je n'avais demandé le changement
d'aucun vicaire quel qu'il fut.
Dès le début j'ai éprouvé une grande antipathie pour ce monsieur.
Antipathie qui va toujours
croissant malgré mes efforts pour la combattre. J'avais témoigné à
Monseigneur Sergent combien
j'étais contrarié de ce placement, mais il n'a pas tenu compte de mes
observations. Je connaissais
déjà M Kerloch, il n'était alors que simple clerc, et à Plogoff il fit
son possible pour indisposer sa
famille contre moi; depuis qu'il est prêtre je connais sa manière
d'agir à l'égard de M. Treguer à
Hanvec, à l'égard de M. le Berre et à l'égard du recteur de Combrit.
Mais s'il était difficile alors, s'il se plaignait alors de tout, à
plus forte raison aujourd'hui, habitué
qu'il a été à Riec à trancher du recteur aussi.
Lorsqu'on peut arracher quelques mots de lui, c'est toujours le thème
de Riec; les merveilles qu'il y a
opérées malgré la faiblesse de l'administration ecclésiastique. M.
Marrec me disait l'autre jour qu'il
était absolument lassé du narré de ses hauts faits à Riec.
Au mois d'août dernier je vis le supérieur du grand séminaire et il me
dit :
"il faut avouer M. Clévarec que vous avez eu à subir de tristes
vicaires et celui que vous
avez dans ce moment est un homme dévoyé, il semblerait qu'il lui
manquât un grain; il est
venu ici lorsqu'il allait à Plozévet et il a voulu me raconter tant
d'extravagances et de
l'évêque et de M. Jégou, et de tous les supérieurs, que j'ai été obligé
de lui tourner le dos."
Effectivement dès son arrivée à Plozévet, pendant plus de trois mois,
on n'a entendu d'autres
conversations. Il se plaint de tout, son vicariat est insuffisant, sa
quête n'est pas une quête; il seplaint de la pension, il se plaint de
son recteur, à qui veut l'entendre non seulement aux
ecclésiastiques mais aussi aux laïcs. On voit que c'est vraiment un
homme dévoyé, le temps qu'il ne
passe pas à bavarder dans les maisons du bourg et des villages, il le
passe à regarder de sa fenêtre, il
ne s'occupe pas. A table il est tellement désagréable qu'à peine
puis-je lui arracher un mot. Je lui
laisse cependant toute liberté de se promener et il en profite
largement. Je ne lui demande jamais un
service, que le strict nécessaire. J'ai trouvé dans M. Marrec un bon
vicaire mais il ne sera pas à
bonne école si vous tenez à maintenir Kerloc'h à Plozévet. L'été
dernier je lui ai fait dire par son
confesseur que puisqu'il se déplaisait tant à Plozévet, de demander
mieux et que j'aurais appuyé sa
demande; mais rien ne s'est fait, au contraire, il fait son possible
pour se mettre bien avec les prêtres
voisins afin de se faire appuyer au besoin. Le 1er jour de son arrivée,
il m'a dit qu'il avait dit à
Monseigneur de le mettre à pied et que si dans 15 mois, il n'était pas
placé, il s'y mettrait lui-même.
Les 15 mois sont passés, et je ne vois pas qu'il se presse.
Ma santé s'altère depuis l'arrivée de ce monsieur, et je crains qu'elle
ne s'altère davantage si je me
vois obligé de le subir longtemps. Si Mgr Sergent avait une pénitence à
me poser, je la trouve assez
longue. Si l'administration voulait bien placer M. Kerloch chez le plus
méritant des recteurs, et si
dans un an les plaintes cessent, je consens à avoir tort. Je ne
voudrais pas cependant son déplacement
avant le 16 juin jour de la confirmation à Plozévet. Je crois que M.
Marrec irait très bien comme 1er
vicaire avec un second de l'ordination. Pour empêcher les cancans si
vous pouviez lui donner la plus
humble des paroisses ou tout autre chose minime, ce serait je crois
pour le mieux. C'est un homme,
quoiqu' ayant une valeur très ordinaire,[qui] a des prétentions
énormes.
Enfin monsieur le Grand-Vicaire j'ai un devoir, vous donner toute ma
pensée.
Vous verrez dans votre sagesse quelle conduite tenir.
Veuillez agréer Monsieur le Grand Vicaire mes sentiments très
respectueux.
Clévarec
Mathieu Clévarec quitta Plozévet en 1872 après y avoir été pendant 2
ans vicaire et 14 ans recteur.
C'est sans doute la lettre du recteur qui valut au premier vicaire son
déplacement pour Lababan, où il fut promu
recteur en 1875.
Il y resta jusqu'à cette fin de 1888, où un événement tragique mit fin
à sa ''carrière''.
L'église de Lababan, avec le presbytère à droite.Epilogue...
Clet Kerloc'h : Le début de la fin....
extraits de ''L' Union Monarchique ''- oct 1888-
Clet Kerloc'h se retira à Plogoff où il décéda en août 1895.
La Semaine Religieuse publia une nécrologie laconique :
"M. Kerloc'h, ancien recteur de Lababan, mort à Plogoff, le 5 août, âgé
de 65 ans".