Il est à votre connaissance sans doute, M. Le préfet, que la femme à Plozévet est beaucoup plus désordonnée que l’homme et plus que lui peut-être, livrée au vice dégradant de l’ivrognerie, or, ce vice surtout chez la femme, mène directement à l’immoralité et à des désordres sans nombre. Par suite de cette démoralisation, l’éducation des enfants est totalement négligée et les ménages sont en désordre par suite de ce malaise qui pèse sur presque toute la population. Je vois donc M. Le préfet que le moyen le plus efficace de moraliser peu à peu cette malheureuse population, ce serait de commencer par la femme et lui donner de bonne heure des principes de modestie et d’économie. [...] » 10.01.1861 - résumé du rapport du conseil municipal qui reprend les arguments du recteur. Le conseil propose une école publique mixte tenue par des sœurs car : La population est pour. Les petites filles sont ignorantes et les ménages mal gérés. Les femmes sont livrées, plus que les hommes, au vice dégradant de l’ivrognerie. Il n'y a pas assez d’enfants pour alimenter deux écoles à cause du manque de goût pour l’instruction. Les sœurs auront un double rôle : éducation et suivi sanitaire auprès des très nombreux pauvres de Plozévet. 16.11.1862 - Le conseil municipal prévoit les dépenses pour l'accueil des 2 sœurs de la communauté de Kermaria de Locminé : Jouissance sans impôt du logement ; mobilier + classe convenable ; mobilier personnel convenable ; 100F pour le voyage ; contribution scolaire des enfants ; petite pharmacie. En 1872, le recteur Clévarec a 58 ans et il va quitter Plozévet pour sa paroisse natale. Pendant 14 ans, ses rapports avec la municipalité de Plozévet ont parfois été difficiles mais sont restés courtois. La statue était appelée « Imaj ar Werc'hez » , ou parfois seulement « An Imaj » . Ci-contre une vue de la statue vers 1950 : en arrière plan, la route d'Audierne et des champs. Histoire et Patrimoine raconte : Autrefois à Plozévet... N°21 "Posuerunt me custodem" La mission de 1865 Depuis 1858, le recteur était Mathieu Clévarec. 1865 fut, à Plozévet, l'année de la ''grande mission'' qui dura deux semaines et ranima le culte à la Vierge. Le 21 juillet 1867, jour de la fête de Madeleine, la statue de la Vierge, commandée par le recteur, fut érigée ''dans la montagne de Lesplozévet ''. Malgré le mauvais temps, les vêpres et la procession avaient attiré une foule considérable. Cette fête fut l'occasion de ranimer le pardon de ''la Madeleine'', célébré jadis à la Trinité puis à l'église paroissiale. Le pardon, le premier dimanche de mai, fut institué en 1869. La statue n'est pas une œuvre d'art, elle est en ciment et ne doit pas être unique en France. La Vierge est debout sur une sphère, écrasant un serpent et triomphant du mal. A ses pieds, une inscription en latin : ''Posuerunt me custodem'' pourrait se traduire par : ''Ils ont fait de moi leur gardienne''. (citation tronquée du Cantique des Cantiques) Le pardon religieux qui a longtemps conduit les processions au pied de « l'Image de la Vierge », chaque premier dimanche de mai, a duré jusqu'aux années 1960. Son importance était telle qu'en 1889, le conseil municipal de Lucien Le Bail devait reconnaître que la commémoration du centenaire de l'ouverture des Etats Généraux n'était pas possible le jour du pardon. Page 1Voyons quelques détails, dans l'ordre chronologique : Les principales sources d'inquiétude sont l'abus d'alcool, l'illettrisme, le manque d'argent et l'oisiveté des indigents. Procession à la vierge (années 1950-1960) Quels étaient donc ces maux qui rongeaient la société plozévétienne ? Taolenn (c1900): ''les péchés capitaux'' Les rapports des conseils municipaux et les courriers du maire Pierre Julien et du recteur Clévarec nous éclairent un peu. 1858 - Lettre de M. Clévarec, recteur (44 ans) au maire P. Julien « Il y a un cri général à Plozévet à la vue des désordres qui se tolèrent au bourg le dimanche et même les jours sur semaine. Parmi les sauvages on ne se maltraite pas à ce point. Tous les dimanches, le bourg est plein, jusqu’à la nuit et probablement au-delà. On ne peut plus sortir de la maison sans voir le spectacle hideux d’hommes qui se battent comme des animaux, et cela à la vue de l’autorité qui craint de se montrer. N’êtes-vous pas affligé, comme moi, Monsieur le Maire, de voir un si grand nombre d’hommes, manger dans les auberges de Plozévet le pain de leurs enfants, promener leur scandale un jour consacré au Seigneur et faire porter aux quatre vents la réputation de la commune ? La chose est déjà passée en proverbe : si vous voulez voir des désordres, si les désordres vous amusent, venez au bourg de Plozévet, là, les auberges sont ouvertes à qui a de l’argent pour payer. Aussi Plozévet est le rendez-vous de tout ce qu’il y a de mauvais dans les paroisses voisines, persuadé que l’on est, qu’il y a pleine liberté. [...]» Ce recteur dynamique, mais très autoritaire, tenta de lutter contre la débauche autour des tavernes du bourg et contre l'illettrisme. Il s'efforça de mettre en place une aide aux indigents, très nombreux dans la commune, et pesa de toute son influence pour qu'enfin, soit construite une école communale mixte où, en 1863, s'établirent les sœurs de Kermaria. 12.02.1860 - Extrait du rapport du conseil municipal « Plozévet est l’une des communes les plus importantes du canton et la plus délabrée (édifices publics et chemins) . Il n’y a ni mairie ni maison d’école convenable. Les femmes n’ont aucune instruction, d'où l'urgence d’avoir des sœurs de la Charité pour l’instruction des petites filles. Un tiers de la population vit de la mer, si cette ressource venait à manquer elle serait réduite à mendier. Les campagnards sont peu soucieux de l’avenir, d’où la nécessité de créer un bureau de bienfaisance. L’alcoolémie est considérable en raison des deux grandes routes allant aux foires. Doublée lors des fêtes, du carnaval et des moissons. » Il apporta des améliorations à l'église paroissiale et au presbytère, parfois même avec ses propres deniers. Il fit acheter les statues de Ste Anne et St Joseph et un chemin de croix. Les conseils municipaux répercutèrent à travers leurs rapports les vœux et conseils évoqués par Mathieu Clévarec dans son courrier au préfet. L'entente avec Pierre Julien semble avoir été cordiale, même si, en février 1864, le recteur écrivait : « M. le maire de Plozévet est un très bon homme mais, par malheur, il est très faible » Le 8.11.1860 - Le recteur écrivait au préfet « Comme l’école dirigée depuis plusieurs années par un instituteur n’a pas, jusqu’à présent, de résultats, toute la population fait des vœux en faveur de deux sœurs de charité, une pour une école mixte et une autre pour voir les malades indigents. Je crois qu’une école dirigée par une sœur de charité serait un avantage appréciable surtout pour l’instruction des petites filles qui sont aujourd’hui totalement abandonnées, or cet abandon et cette ignorance sont la principale cause de la démoralisation chez la femme. Page 2 Page 3