«Quand nous eûmes triomphalement combattu contre notre dîner, nous descendîmes à la cuisine tout fatigués de notre victoire. L'instituteur primaire du village était assis à table. C'était un épais jeune homme, vêtu d'une grosse veste et chaussé de vigoureux sabots. Il nous salua timidement quand nous entrâmes et se reprit à manger une lourde écuellée de soupe au pain.» Puis, Mr Bataille raconte ses exploits de soldat d'empire. Flaubert poursuit : «C'est qu'il ne lui arrive pas souvent l'aubaine de repasser ainsi en revue sa vie d'autrefois, car maintenant, devenu paisible et de facile composition, il rend sa femme heureuse et vit en bonne intelligence avec le maître d'école, quoiqu'il ne soit pas toujours de son avis : ainsi, il trouve la langue bretonne très riche et l'instituteur la trouve très pauvre ; ces dissidences ne vont jamais très loin, car le magister abandonne très vite son opinion quand son hôte ne la partage pas. Au reste, ils furent unanimes pour nous dire que les jeunes filles bretonnes sacrifiaient volontiers au petit dieu badin derrière les haies et sur les bottes de paille et que, dans les assemblées, elles se cotisaient pour payer de l'eau de vie aux garçons afin de ne pas manquer de danseurs. Fiez­vous donc après cela à la vertu bretonne célébrée dans les romances de M. Gustave Lemoine, mises en musique par Mlle Loïsa Puget.» En 1849, Mr DEROFF, jeune normalien, remplaça Mr JADE dans une maison d'école délabrée. En 1861 s'ouvrit, enfin, la nouvelle école mairie de la route d'Audierne. La municipalité de Pierre JULIEN souhaita l'arrivée de deux sœurs de Kermaria pour remplacer Mr DEROFF, en mauvaise santé. (*) Charles BATAILLE, né le 5 août 1791 à Louviers. Décédé le 2 septembre 1850 à Plovan. Marin sur un navire marchand puis sur un corsaire. Soldat de l'armée napoléonienne. Nommé douanier, puis brigadier à Plovan vers 1816. Sous lieutenant des Douanes, puis cabaretier au bourg de Plovan. Histoire et Patrimoine raconte : Autrefois à Plozévet... N°23 Les premiers instituteurs. An II 1850 Sources : Conseils municipaux Courrier des maires AD29 : recensement, état civil Gallica BnF Après la Révolution, Plozévet eut des instituteurs : Jacques LE BOULC'H cadet, clerc de notaire, et Jeanne Louise GUEZENNEC, veuve Urvoas y faisaient l'école en l'an II, dans une maison du bourg. En ce temps là, plus que les diplômes, ce qui importait c'est qu'ils ne soient pas ivrognes !! Le maître rendit compte de ses méthodes au Conseil du District : « Quelques phrases bretonnes à rendre en français et quelquefois des françaises à rendre en breton. Je les fais interroger l'un par l'autre sur ce qui s'est fait la veille et j'applaudis ceux qui répondent le mieux. » Bientôt l'instituteur, en conflit avec le maire Henry GENTRIC, partira à Primelin. Le prêtre assermenté, Luc QUILLIVIC, le remplacera en l'an III... Henry Gentric connaîtra les geôles de Pont Croix et la mesure aura toute la publicité possible pour que « l'exemple funeste qu'il a pu donner par rapport à l'instruction publique ne se propage pas dans nos campagnes. » On parla pour la première fois d’une maison d’école en 1835 : Le recteur voulait se débarrasser de la « maison Perrot », annexe du presbytère, construite vers 1820 avec l’argent de la fabrique, sur un terrain privé, par le recteur Perrot voulant se loger confortablement. Elle fut acquise, déjà délabrée et humide, par la commune en 1835 pour 3000 F. Le maire s’engageait aussi à boucher les ouvertures donnant sur le presbytère, ce qui ne se fit pas tout de suite ... Page 11836 (recencement) Yves LE CORRE, 30 ans, est recensé ''instituteur''. Né à Morlaix, fils du brigadier des douanes de Lescoff en Plogoff, il est hébergé dans le cabaret Guillou Bodet. En octobre 1836, à son mariage, il est ''praticien''. Guillaume Fidèle Guillou, le cabaretier, décédera bientôt à l'hôpital des aliénés. Yves le Corre deviendra aubergiste. En 1839, il est l'un des trois membres du conseil municipal sachant signer. Il est remplacé à l'école par François Marie LE GUILLOU qui possède le brevet de capacité depuis 1821, et un certificat de moralité délivré par le maire de Châteaulin (où il est recensé à 57 ans, en 1836, avec son épouse de 38 ans). 1841 (recencement) François Marie LE GUILLOU, né en 1778, est instituteur du 30 août 1839 à l'an 1847. (Epoux de Marguerite BOULOUARD). Sébastienne LE GUILLOU, est institutrice et vit chez eux, avec un escolier. Yves LE CORRE, devenu aubergiste, est l’époux de Henriette GUEGUEN de Kéringard. (Ils eurent une fille : Henriette). 1843 1844 1845 Yves LE CORRE décède en juillet 1844 à 39 ans ; en juin 1845, sa veuve a épousé Michel MAURIS, tailleur de la Trinité [qui signe] et qui deviendra aubergiste au bourg et aussi adjoint au maire. 1847 Pas d'instituteur au bourg. Mr LE GUILLOU a démissionné. Mr FEUNTEUN est appelé pour le remplacer, mais il a un problème personnel à résoudre... Le maire propose son fils Jacques Jean Louis LE GUELLEC de Brenizennec, mais il n'a aucun diplôme et écrit difficilement. Le préfet refuse. 1848 En novembre 1848, c'est Mr JADE de Plovan qui s'est proposé pour le remplacer. Guillaume Jadé est né le 23/02/1826, quartier sous les halles à Pont Croix, au domicile de son oncle,. Sa mère Anne Le Jadé est une boulangère de 36 ans. Il est enfant naturel, boursier de l'Ecole Normale de Rennes, sorti en 1844 . Il doit un engagement décennal et enseigne à Peumerit (1845), puis à Plovan où l'effectif de l'école est trop faible pour lui permettre de gagner correctement sa vie. Une mutation à Lopérec est envisagée sans succès, il envisage alors Audierne. Page 2 L'inspecteur note : Mr Jadé ''est un esprit remuant et assez porté à se plaindre. Cependant, dans la circonstance actuelle , je crois qu'il y a lieu de faire droit à sa réclamation. Cet instituteur n'a, il est vrai, qu'une capacité ordinaire, mais il est d'une conduite que l'on peut appeler exemplaire.'' M. Jadé écrit au préfet pour lui annoncer son départ de Plovan, mais il est tenu par son engagement décennal. Le 4 janvier 1847, il écrit au sous inspecteur des écoles primaires de Quimper. Ce dernier rend compte de la situation au préfet : les 350 F de ressources annuelles ne lui permettent pas de vivre. L'inspecteur écrit : ''J'ai trouvé dans la classe de M. Jadé des résultats satisfaisants, ce qui me porte à croire que le petit nombre des élèves doit être attribué non à l'incapacité ou à la négligence de l'instituteur, mais à l'indifférence des parents et à la position du bourg de Plovan à l'une des extrémités de la commune ce qui, joint au mauvais état des chemins, rend la fréquentation de l'école très difficile, surtout en hiver.'' Il obtiendra un congé temporaire. De février à juillet 1848, il est secrétaire de mairie à Pont­Croix. En août 1848, il reçoit l'ordre de reprendre ses fonctions, il envisage de postuler au poste de Plouhinec, sans suite. En novembre, il se propose pour le poste de Plozévet, pour 2 ans. Il ira ensuite à Cléden Cap Sizun jusqu'à septembre 1860. (en 1856 il y habite avec sa mère) source ADF 1 T 531 et recensements. Mr Guillaume JADE, 21 ans, est l'instituteur en sabots que FLAUBERT va rencontrer dans l'auberge BATAILLE à Plovan. En 1847, Gustave FLAUBERT et Maxime DU CAMP partent visiter la Bretagne, ''Par les champs et par les grèves''. [écrit numérisé sur Gallica BnF] Après de nombreuses péripéties, ils arrivent à Plovan, dans l'auberge des époux Bataille. Charles Bataille(*) était un douanier en retraite, personnage haut en couleur qui s'improvisa aubergiste. Madame Bataille avait préparé une poule fraîchement abattue et un peu coriace. Flaubert évoque alors sa rencontre avec l'instituteur : Page 3