Histoire et Patrimoine raconte :
Autrefois à Plozévet...
N°24
Nous avons dansé chez Donnars !
Construits en 1911, la buvette des Droits de l'Homme et son dancing ont
longtemps été la cause de mauvaises humeurs des autorités religieuses
du début
du 20ème siècle. (voir Tal ar Sonerien n°37)
La famille DONNARS, famille de cabaretiers et de musiciens, n'était
guère
appréciée par le très conservateur recteur GUIRRIEC, ce qui n'empêcha
pas les
Plozévétiens de fréquenter la buvette et le dancing avec beaucoup de
plaisir et
d'assiduité.
Installation du Crédit Agricole
La banque occupe le bâtiment complètement transformé et modernisé.
Nous donnerons quelques images qui ont toutes été communiquées par
Alice
DONNARS, nous y ajouterons aussi quelques anecdotes lointaines.
Il est difficile d'imaginer que cet espace
était une salle de danse dont on voit ici
la partie nord, occupée aujourd'hui par
les bureaux de la banque.
En 1911, la maison n'avait pas de mansardes. Le dancing a, lui aussi,
subi de
nombreuses transformations depuis sa construction.
Ci dessous, vues de la salle de danse « Chez Etienne », parée pour le
réveillon.
Le violon du char
du quartier de
Corngad (fête des
écoles début des
années 60) décore
l'arrière
de
l'estrade.
Page 1La vie au cabaret donna parfois bien des soucis au tenancier.
Nous évoquerons
un événement que Etienne Donnars père, qui n'en était pas responsable,
aurait
bien aimé ne pas vivre :
A la foire aux gages du 26 décembre 1911, sur fond de querelle
politique :
A la St Etienne, un coup de parapluie mortel.
Nos lecteurs se rappellent sans doute le drame rapide qui se déroula le
26 décembre
dernier à Plozévet.
Ce jour là se tenait la foire aux gages. Il y avait, comme de coutume,
beaucoup
d'affluence au bourg et de nombreux consommateurs dans les débits.
Deux groupes, composés de patrons et de domestiques, se trouvèrent à un
certain
moment dans le cabaret tenu par M. Donnart. Une discussion s'éleva
entre les
nommés Kérourédan et Gentric père.
On se sépara en échangeant quelques menaces.
Un hasard malheureux fit rencontrer de nouveau les deux groupes vers la
fin de la
journée*. Cette fois, une rixe éclata et le nommé Mazo, fermier à
Plouhinec et allié
des Gentric, saisissant soudain son parapluie, en porta un coup de
pointe au
domestique de Kérourédan, Alain Hélias.
Le coup, porté avec une certaine force car Mazo est extrêmement
vigoureux,
atteignit Hélias à l'oeil gauche. La pointe du parapluie pénétra dans
l'orbite en
crevant la paupière, brisa la voûte crânienne et pénétra dans le
cerveau.
Hélias tomba à terre comme une masse, sans un cri. Il ne tarda pas à
expirer.
Jacques Mazo comparaît aujourd'hui devant le jury sous l'accusation de
coup mortel.
C'est un homme de 37 ans, marié et père de 4 enfants qu'il fait vivre
de son travail. Il
jouit d'une parfaite considération dans la commune.
A l'audience, Mazo exprime ses regrets de l'acte fatal qui termina
cette journée
mouvementée. On entend ensuite de nombreux témoins qui donnent de longs
détails sur cette malheureuse affaire.
Ci contre :
La « Buvette du Vaisseau des
Droits de l'Homme »* dans
les années 50.
*C'est écrit au dessus de la
porte du bar.
A la fin des années 60, le bourg poursuivait sa transformation autour
de l'espace
laissé libre par la disparition, quelques années plus tôt, de la maison
Kérisit.
Au début de 1968, la maison du Vaisseau fut rasée, elle aussi.
Les événements de mai 68 à Paris donnèrent des idées aux jeunes
Plozévétiens :
Dans la nuit du 26 mai, le centre bourg a connu sa barricade,
construite en
partie grâce aux planches et poutres récupérées dans les déblais de la
démolition
de la buvette ''le Vaisseau des Droits de l'Homme'' !
La gendarmerie intervint et certains connurent la rétention à la
brigade de Pont
Croix.
M. Brunier, substitut, prononce un réquisitoire modéré contre l'accusé
dont il
reconnaît la bonne conduite habituelle. Mais une peine effective lui
paraît nécessaire
car l'acte irréparable doit avoir une sanction.
Me Le Bail fils, qui assiste l'accusé au banc de la défense, s'efforce
de démontrer quel
rôle la fatalité a joué dans cette affaire tragique. Il supplie le jury
de se montrer
indulgent envers un homme qui en fut lui aussi la victime, et demande
son
acquittement.
Après une courte délibération, le jury rapporte un verdict négatif sur
toutes les
questions. Jacques Mazo est acquitté.
Audience du 23 avril 1912. Texte paru dans « Le Citoyen » : compte
rendu du procès.
*Devant les cabarets Kérisit et Donnart.
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Une nouvelle maison fut construite et la COOP de Mr et Mme JADE,
premier
libre service de la commune, remplaça la salle de danse.
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