Autrefois à Plozévet : les vieux métiers
Le maréchal-ferrant
Le ferrage avait pour fonction la protection du pied du bœuf ou du
cheval de trait.
I
Saint ALAR : Ermite, né peut être en Cap-Caval, décédé en 462
Troisième évêque de Quimper, après St Corentin et St Conogan, une
vallée de la rivière Odet porte son nom .
Nous ne savons rien de la vie de ce saint dont le culte est répandu
dans le diocèse de Quimper.
Très populaire comme protecteur des chevaux. On lui faisait des
offrandes de crin.
Sa vie étant oubliée, au Moyen Age, il fut remplacé par Saint Eloi , le
Bon St Eloi de la chanson., beaucoup plus jeune que St Alar !!!
Ci-contre, St Alar utilise une méthode très particulière consistant à
couper le pied pour le remettre en place à la fin du travail.
Saint- Alar à l'ouvrage (XVIème, statue classée)
Groupe statuaire monobloc en bois polychrome.
(Eglise St Démet)
Revenons maintenant à une légende qui s'attache à la statue ci-dessus :
(texte de Y.P. Castel , tiré de "Légende dorée des saints Bretons"
collection "Images de Bretagne"
Editions d'art Jos Le Doaré à Châteaulin 1968)
« ''ALAR, maître parmi tous les maîtres.''
C'est l'inscription que l'on pouvait lire à l'entrée de la forge où
Alar, avec grand talent, pratiquait son métier.
Il arriva, un jour, un inconnu ; apparemment il cherchait de
l'embauche, mais avant d'entrer il regarda
longtemps l'orgueilleuse inscription.
''Montre-nous d'abord ce que tu sais faire '', lui dit dédaigneusement
le patron, ''il y a justement un cheval qui
est pressé.''
Ah, ce ne fut pas long ! Le compagnon prit une barre, la jeta au feu,
la battit sur l'enclume, alla vers la bête, lui
coupa net le pied, appliqua le fer, cloua, lima, para le sabot et... le
remit en place tout naturellement :
''C'est ma façon, dit-il, je connais l'autre aussi, mais celle-ci est
plus rapide.''
Alar n'était pas encore revenu de sa surprise que le deuxième, puis le
troisième furent cloués de la même
manière...
Juste à ce moment, un homme s'engouffra dans la forge en criant :
''Alar, mon cheval ! Viens lui faire quelque chose, il est furieux, je
ne peux plus le tenir.
– je connais aussi les remèdes pour guérir les chevaux.
Et l'inconnu s'en alla avec le paysan, tandis qu' Alar se prit à
réfléchir :
''En attendant qu'il revienne, si j'essayais la nouvelle méthode pour
le fer qui reste à forger ?''
Il fait en tout point comme il venait de voir faire au compagnon.
Tout alla d'ailleurs bien jusqu'à replacer le pied.
Mais..mais le pied ne voulait pas tenir et le cheval de perdre le sang
en abondance jusqu'à s'affaisser
lourdement.
'Malheureux ! Mon cheval '' cria subitement le cavalier qui rentrait de
l'auberge voisine où il attendait le fin de
l'ouvrage. Déjà il saisissait la paire de tenaille pour frapper le
maître imprudent.
''Pitié, Pitié, mon bon seigneur !...''
Tout ce bruit alarme l'inconnu qui revenait après avoir guéri le cheval
furieux. Juste à temps pour arrêter en
l'air les tenailles menaçantes.
Calmant l'homme, il remet le pied en place, et voilà la bête debout,
plus vigoureuse que jamais
Au milieu de la stupeur générale l'inconnu s'adressa au forgeron et lui
dit avec une pointe de moquerie :
''Maître des Maîtres, tu as sans doute oublié un des points de ma
nouvelle méthode !''
Puis il prit lentement sa veste pour s'en aller ;''Au revoir Maître des
Maîtres.''
Et il disparut dans la poussière lumineuse du chemin...
Alar revenu de sa frayeur décrocha sur le champ son enseigne et martela
les lettres trop orgueilleuses.
Ce fut la première action de vertu que fit ALAR-LE-PAIEN car il venait
de comprendre que seul un ange ou
un envoyé de Dieu pouvait avoir, devant lui accompli tel prodige. »II
Autrefois à Plozévet ...
Dans les temps anciens, la première fonction du maréchal-ferrant
consistait à soigner les chevaux. Il était artisan et
vétérinaire en quelque sorte.
On sait par des écrits et des fouilles archéologiques que les grecs
protégeaient les pieds des chevaux par des pièces de cuir, les
Romains utilisaient l'hipposandale (lanières de cuir qui
maintenaient des plaques métalliques aux bords relevés pour
épouser le bord des sabots). Elle sert encore pour les chevaux
blessés.
En Europe occidentale, c'est au début du Moyen Âge que se
vulgarise l'usage du fer cloué.
Les techniques de forge évolueront au cours des âges.
Le maréchal-ferrant devait aussi savoir confectionner l'essentiel des
outils agricoles, pioches, pics, charrues...
Ci-dessus la pose d'un fer en 1961 à Plozévet :
Extrait de rushes de Mr Gessain
Ci-contre :
Sabot de cheval (encyclopédie Larousse)
Selon André Burguière :
'En 1965, on comptait dans la commune de Plozévet 130 commerçants et
assimilés, dont 7 forgerons , 6 couturières,
13 tailleurs, 26 boulangers, 7 bouchers, 45 cafés-épiceries (l'extrême
dispersion de l'habitat facilitait la prolifération
des petits commerces) alors que 15 commerçants seulement étaient
recensés en 1830.''
En 1911, les recensements nous donnent 7 forgerons au bourg et
Lesplozévet.
Ci-contre
le maréchal à Poudu vers 1960.
III Anecdotes de chez nous, par Pierre-Jakez Hélias
•
Extrait de Midi à ma porte
Celui là [le forgeron], c'était le héros des Morceaux Choisis pour les
écoles. Le maître du feu, pensez
donc ! Vulcain autant dire, et presque Prométhée * . Les images le
montraient dans sa forge, avec ses gros bras
et sa grosse moustache. Il pétrissait à coups de marteau une barre de
fer rouge qu'il tenait sur l'enclume au bout deses grandes tenailles
pendant que son apprenti entretenait la braise vive en maneuvrant la
chaîne du soufflet.
[...]
Et voilà que s'éteignent les dernières forges. Même à la campagne, la
plupart des enfants n'ont jamais béé de la
bouche devant l'antre de Vulcain. Les Morceaux Choisis sont devenus la
maison de retraite du forgeron.
L'homme est déjà sorti de l'histoire. Il sera promu enchanteur ou du
moins sorcier.
« Il y avait une fois un homme qui travaillait le fer à la seule force
de ses bras... »
* [ ce dernier vola le feu aux Dieux grecs pour réchauffer les humains]
•
Dans Le Cheval d'orgueil on lit :
....
Or, vers 1910, il y avait à Plozévet, deux vicaires qui passaient pour
se livrer à des tours de physique. On racontait
qu'ils détenaient un livre de magie qui était peut être un Agrippa, ce
grimoire qu'il faut attacher avec une chaîne et
corriger à tour de bras pour le faire tenir tranquille. [...]
L'histoire qui avait le mieux établi sa réputation est celle-ci :
Un jour il s'en allait manger chez le recteur de Lababan, à moins d'une
lieue de Plozévet.
A la sortie du bourg, il passa devant une forge. Le maréchal-ferrant et
son aide faisaient leurs sept possibles pour
venir à bout d'un cheval qui ne tenait pas tranquille.
''Vous avez bien du mal avec cette bête'', dit gentiment monsieur C...
en passant.
Le maréchal, de mauvaise humeur et qui n'avait aucune révérence
particulière pour le clergé sur la semaine,
grommela entre son nez et son menton :
''J'aurai le temps de le ferrer cent fois avant que vous ayez fini de
vous bourrer le ventre à Lababan avec votre
compère, sac à mangeaille que vous êtes. ''
Monsieur C... qui avait l'oreille fine l'entendit.
''Je vous parie, dit-il, qu'à mon retour ce pauvre cheval aura encore
le pied nu !''
Et là-dessus il continua sa route.
''Allez au diable '', criait le maréchal, tout suant de colère et
d'énervement.
Croyez moi si vous voulez, mais il s'épuisa tout l'après-midi contre un
animal de mauvaise volonté. La bête qu'il
connaissait bien pourtant, se montrait nerveuse et sournoise au point
qu'il risquait sa vie à chaque fois qu'il voulait lui
prendre seulement le sabot. Tout l'après midi, devant la forge on vit
une lutte sans rémission entre le maréchal tout
ruisselant et le cheval dont le cuir fumait au soleil comme une
lessive.
Entêté comme seul un bigouden peut l' être quand il s'y met, l'homme
s'acharnait à maintenir par tous les moyens une
espèce d'animal sauvage qui hennissait à mort, encensait de la tête, la
crinière hérissée, bottant des quatre fers moins
un et virant comme l'éclair autour de sa longe ?
Un vrai cheval d'Apocalypse.
Quand le soleil se mit à descendre dans la mer, Monsieur C... repassa
devant la forge.
'' Alors, maréchal, je vous l'avais bien dit.
Un sort ? Qu'est-ce que c'est? Au lieu de lâcher des sottises, vous
feriez mieux de patienter un peu, mon ami.
Continuez à travailler ce cheval. Quand sonnera l'angélus du soir, il
se calmera tout seul.''
Et il advint comme il avait dit.
Le roi était Ludov XVI, c'est à dire Louis XVI