D'après le bulletin paroissial Keleier. [Décembre 1963 et début 1964.] A Plozévet autrefois... Le ''règne de sœur Salomon''. Ce qui suit se termine par un hommage à une religieuse qui se dévoua sans compter, au début du 20ème siècle, pour servir une commune sans médecin [ le docteur Sartre est arrivé en 1920] et soulager les habitants isolés dans des hameaux inaccessibles en pleine épidémie de grippe espagnole.. L'arrivée des sœurs : L'école de la route d'Audierne avait été construite en 1863 ; au début, c'était une école publique mixte, dirigée par les sœurs de Kermaria, selon les souhaits des conseillers municipaux : Les sœurs auront un Plozévet.. Le 10 janvier 1861, le conseil propose une école mixte des sœurs car : La population est pour. Malgré la bonne volonté de l’instituteur, l’école des garçons n’a jamais eu de résultats à Plozévet..... Les petites filles sont ignorantes et les ménages mal gérés. Ignorance religieuse. Les femmes sont livrées, plus que les hommes au vice dégradant de l’ivrognerie. Pas assez d’enfants pour alimenter 2 écoles à cause du manque de goût pour l’instruction.. double rôle : éducation et suivi sanitaire auprès des très nombreux pauvres de Le Bourg en 1899_Photo Rousselet. Les sœurs quittent l'école: A partir de 1903, seules deux sœurs resteront à Plozévet. Le ''bon recteur Henry'' mourra à Plozévet en 1908 et Mr Guirriec le remplacera dans un climat plus hostile. Il ne fut pas facile de trouver un logement pour les deux religieuses.Dans les lignes qui suivent, Corentin Le Guellec évoque cette période. Extrait d'un discours de M. Corentin le Guellec à l'occasion du centenaire * (Keleier 1963**). * de l'école des sœurs, qui était en fait une ''école publique tenue par les soeurs'' **le texte évoque donc des lieux et personnes aujourd'hui disparus [...] '' En 1913, arrive sœur SALOMON. Une maison est trouvée entre temps face à l'actuelle école [ Ste Jeanne d'Arc], la maison des demoiselles Kérourédan. Madame Yvinou y exerçait le métier de couturière. La maison abrite maintenant deux nouvelles religieuses : Sœur Salomon , infirmière, et sœur Alain, fleuriste, venue du Cap. Je termine l'époque obscure et commence ce que j'ai entendu appeler ''le règne de Salomon'' : Une maison modeste, une table encore plus modeste : Combien de fois sœur Alain n'eût-elle pas le cœur chaviré en regardant sur le feu les pommes de terre en pluches qui cuisaient dans l'eau, et comme elle gémissait ''si seulement nous avions un peu de lait pour boire avec...''. Sœur Salomon disait dans son inextricable breton du Morbihan '' Ne vous en faites donc pas ma fille, la Providence veille sur nous !'' Presque toujours, l'instant d'après, la porte s'ouvrait et une voisine ou une dame du bourg apportait une bouteille de lait baratté ou autre victuailles. Vient la Grande Guerre, ce qui n'arrange pas les choses. Les hommes partis, femmes et vieillards prennent la ferme en main. Mais le revenu s'amaigrit et les santés déclinent. La sœur pharmacienne suffit à peine à la tâche. Point de chemins tracés... la sœur invente la géométrie, la ligne droite devient le plus court chemin d'une ferme à une autre. Sœur Salomon s'oriente dans les champs, traverse les labours et les récoltes sur pied, les champs de pommes de terre, relève ses jupes pour franchir les ruisseaux. S'embourbant fréquemment, elle arrive toute crottée à la ferme, donne les soins et repart immédiatement avec une bouteille de lait dans les plis de sa robe.La guerre va enfin s'achever : 1918, la victoire et le retour des soldats. Las ! Voilà qu'éclate une autre bombe : la peste que l'on camoufle en grippe ---fut-elle espagnole--- décime les campagnes et les bourgs. Plus question que la sœur fasse les chemins à pied, c'est aux chars à banc de faire la queue devant le dispensaire. Lorsque l'un la ramène, un autre la reprend. Malgré son dévouement, son rôle se limitait pourtant souvent à préparer le malade à l'ultime visite du père Gloaguen, ce missionnaire de Haïti venu seconder le recteur pendant l'absence des vicaires mobilisés. La glèbe de Plozévet porte aussi les traces de ses pas au cours de tournées éreintantes de derniers sacrements. Et comme la peste ne connaît pas de répit, jour et nuit, vent ou neige, rien ne l'arrête. Que de fois ne l'a-t-on pas vu arriver de nuit chez le sacristain, Michel Kerloc'h, pour sécher à son foyer, sa soutane trempée, parce qu'il n'avait plus d'autre à se mettre ! 1930_ Corentin et sa famille à Brénizennec.